Mon institutrice

« Madame M » était ma première institutrice à l’école primaire. Petite de taille, ronde et blonde, c’est tout ce que mon cerveau a préféré garder comme informations la concernant. Des informations qui ne font que l’encombrer :-), mon cerveau je veux dire. Cette chère institutrice avait un vice, un vice si terrible que j’en ai souffert personnellement toute une année. Bienvenue au monde des adultes Rihab. Elle était d’une curiosité maladive. Comme mes parents faisaient partie du corps professoral, cette dame, à travers moi, voulait savoir comment ce jeune couple vivait au quotidien, sûrement pour alimenter les discussions tant intéressantes sur les uns et les autres. J’avais droit à toute sorte de questions commençant par « Qu’est-ce que vous avez mangé au déjeuner ? », passant par « c’était comment votre mouton de l’Aid ? » et finissant par « Qu’est ce que ta maman a acheté dernièrement ? ». Une fois, j’étais en train de m’amuser à plier une feuille sous forme de Briouate, elle n’en revenait pas, a appelé les autres instituteurs pour venir voir une enfant de 6 ans plier des Briouate. Quel exploit !!!!! Peut-on comprendre à 6 ans les manigances des adultes ? Peut-on comprendre la méchanceté dont ils peuvent faire preuve ? Comment pouvais-je soupçonner la gentillesse de ma maîtresse ? Moi qui croyais qu’elle me portait un intérêt particulier. Comme j’étais naïve ! Bien sûr tout ce que je racontais a fini par arriver aux oreilles de ma mère, qui n’était pas du tout contente et m’a interdit formellement de répondre à la curiosité de ma maîtresse. Je ne vous décris pas le tableau…J’étais partagée entre l’autorité du parent et la manipulation de l’institutrice. Entre la punition si je divulgue les « secrets » de famille et la punition si je ne les divulgue pas :-). Je suis toujours là, Dieu merci, et durant tout ma vie quand j’entendais « و كاد المعلم أن يكون رسولا » (le maître a failli être prophète), je dis : mouais, mon œil :-). Tout ce que j’avais à faire, c’est prendre mon mal en patience en étant convaincue que demain je ne serais plus là. Dans le respect de moi-même et de toutes les valeurs en lesquelles je n’ai jamais cessé de croire, aujourd’hui, je dénonce le comportement de ces personnes qui détiennent une certaine autorité, qui à travers leur fonction peuvent exercer un certain pouvoir. J’ai envie de leur dire, n’exercez pas votre autorité en la camouflant sous le nom du respect. Ne poussez pas les autres à s’incliner à vos désirs parce que ça s’appelle de l’injustice. Le positif dans l’histoire, c’est que dès 6 ans j’ai compris, que sur mon chemin de vie, je vais rencontrer des personnes qui vont essayer d’éteindre cette étincelle, cet élan, cette envie et joie de vivre qui m’habitent, que je ne dois pas y céder et que même si la flamme tremble risquant de s’étouffer, elle ne manquera pas de se ressaisir et continuer à briller.

Rihab M.